29/11/2010 Texte

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«Avec WikiLeaks, une ère de grande tension s'ouvre au Moyen-Orient»

Iran, Arabie Saoudite, méfiance envers les Etats-Unis.

Antoine Basbous est le directeur de l'Observatoire des Pays Arabes à Paris. Pour le Parisien.fr, il décrypte les conséquences que pourraient avoir les révélations de WikiLeaks sur le Moyen-Orient. Iran, Arabie Saoudite, méfiance envers les Etats-Unis. ... il s'inquiète du climat de tensions à venir. Le Parisien: Quelles répercussions pourraient avoir, dans le monde arabe, les révélations de WikiLeaks ? Antoine Basbous: Tous les dirigeants qui ont évoqué le problème iranien avec des mots un peu crus vont se retrouver en délicatesse avec Téhéran. La suspicion entre diplomates va s'accroître parce que la méfiance de tous les pays arabes envers l'Iran est désormais publique, officielle, flagrante. Un ministre du Qatar a ainsi résumé la situation : «L'Iran nous ment, nous leur mentons.» Cette phrase symbolise, et dévoile, la réalité de la région. Avec WikiLeaks, une ère de grande tension s'ouvre au Moyen-Orient, d'autant que très peu de documents ont pour l'instant été publiés. La situation pourrait se tendre encore, en fonction de l'ampleur des révélations. Quels sont les premiers pays concernés ? En Arabie Saoudite, où le roi Abdallah a expliqué qu'il souhaitait voir les Etats-Unis «couper la tête du serpent» en attaquant l'Iran, la tension pourrait devenir plus vive. Car le régime de Mahmoud Ahmadinejad dispose là-bas du soutien de minorités chiite et ismaélienne installées en Arabie Saoudite. Ces groupes pourraient manifester leur mécontentement. Pire, les Houthis, une minorité chiite présente au Yémen et proche du régime iranien, sur le même modèle que le Hezbollah libanais, pourraient tenter une nouvelle action contre le territoire saoudien, comme ils l'avaient fait en novembre 2009 pendant trois mois. L'Iran pourrait s'offrir des moyens de pression à travers les groupes qu'il finance et militarise, y compris en instrumentalisant les cellules d’Al-Qaïda installées au Yémen. Et les Américains dans tout ça ? Les diplomates arabes ne parleront plus de la même façon avec les Américains. Qui osera encore se « confesser » à cœur ouvert, alors qu'ils ne sont pas capables de protéger leur cyber-espace ? Il y avait déjà une méfiance, après la guerre irakienne et la crise économique qu'ils ont provoquée, mais là ! Je ne sais pas combien de temps cette crise va durer. Les Etats-Unis vont devoir offrir des garanties de confidentialité à leurs interlocuteurs à travers le monde pour regagner leur confiance. Cela peut prendre des années. leparisien.fr

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
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