22/04/2010 Texte

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Interdiction burqa: premières salves de critiques des radicaux musulmans

PARIS, 22 avr 2010 (AFP) - La volonté de la Belgique et de la France d'interdire le voile intégral ont suscité des réactions hostiles dans les milieux radicaux du monde musulman tandis que les gouvernements, partagés sur la laïcité, hésitaient à se positionner dans un débat délicat pour eux. Jusqu'alors seul l'Iran, au plus mal avec la France, s'en est pris à cette interdiction. Le porte-parole de son ministère des Affaires étrangères, Ramin Mehmanparast, a critiqué le non respect des "droits des musulmans, qui ne sont pas autorisés à appliquer les règles religieuses, notamment en ce qui concerne le port du voile". En Indonésie, plus grand pays musulman au monde, où le port du voile intégral n'est pas une coutume, le président du conseil des oulémas, Amidhan, a estimé que la Belgique et la France allaient "restreindre les droits des femmes musulmanes à remplir leurs obligations religieuses". Au Pakistan, des leaders politiques et religieux ont prédit de nouvelles tensions entre communautés religieuses en Europe. La France et la Belgique "doivent observer la charte des Nations unies", a déclaré Siddiqul Farooq, porte-parole du principal parti d'opposition, la Ligue musulmane du Pakistan-Nawaz. "Ces pays qui se prétendent champions des droits de l'Homme, parlent de liberté religieuse, mais de telles mesures en font table rase", a dit Farid Ahmad Paracha, porte-parole du parti radical musulman pakistanais Jamaat-e-Islami. Alors que la secrétaire d'Etat française à la Famille, Nadine Morano, annonce que la future interdiction s'appliquera aux femmes musulmanes venant en France, le ministère des Affaires étrangères a tenu à souligner que la burqa n'était pas un problème religieux. Le débat "n'est pas propre à la France" et le statut juridique de la burqa "suscite également un débat dans les pays musulmans", a fait valoir le porte-parole du Quai d'Orsay, Bernard Valero, interrogé sur la réponse à apporter à d'éventuelles protestations de gouvernements de pays musulmans. Dans le monde musulman, seul le régime des talibans avait imposé en Afghanistan le port de la burqa, a-t-il rappelé. Antoine Basbous, expert de l'Observatoire des pays arabes, fait la distinction entre les gouvernements, dont une partie sont attachés à des formes de laïcité, et certains religieux radicaux. "Les gouvernements comprennent bien mais ne peuvent pas forcément applaudir", a-t-il dit. Selon M. Basbous, "il y a quelques idéologues, des oulémas qui vont hurler sur les chaînes satellitaires, contre +le pays prétendument des libertés, qui maltraite les libertés+, pour avoir du soutien dans l'opinion publique". Alors que "la burqa n'est pas dans le Coran", ces religieux vont dire: "on viole notre religion". Cependant, selon cet expert, une autre réaction des musulmans modérés sera de dire: "les Français sont chez eux, respectons leur particularisme". Dans tous les cas, l'interdiction dans les deux pays européens se répercutera en "débat de politique intérieure" dans les pays musulmans, a-t-il prédit. De leur côté, les organisations de défense des droits de l'Homme se sont montrées critiques. Pour Amnesty International, cette interdiction n'est "ni nécessaire ni proportionnée" et elle "violerait les droits à la liberté d'expression et de religion des femmes qui choisissent d'exprimer leur identité ou leurs croyances de cette manière". Pour Judith Sunderland, de Human Rights Watch, ces interdictions de port du voile "violent les droits de celles qui ont choisi de le porter et n'aident en rien celles qui sont obligées de le faire".

OBSERVATOIRE DES PAYS ARABES
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